INTERVIEW DE BOU HOUAT

Bou Houat est le plus vieux moine du temple Sailin. A 78 ans, il est le maitre des lieux et le sage que l’on écoute dans la tradition de la fabrication de bijoux au temple. J’ai eu la chance de l’interviewer le 4 Septembre 2023.

Q1 : Bou Houat, pouvez-vous nous parler un peu de votre temple et de la communauté qui y vit ?

Bou Houat : Notre temple se nomme Sailin et se trouve niché au cœur des majestueuses montagnes du Tibet. C’est un havre de paix et de spiritualité où une trentaine de moines vivent en communion avec les enseignements du Bouddha. Nous pratiquons la méditation, l’étude des textes sacrés et cherchons à atteindre l’Illumination.

Q2 : Comment en êtes-vous venu à fabriquer des bijoux pour subvenir aux besoins du temple ?

Bou Houat : Il y a une vingtaine d’années, notre temple traversait une période difficile. Les fondations menaçaient de s’effriter et les intempéries avaient endommagé certaines parties du bâtiment sacré. Notre vénérable maître, le vénéré Sogyal Rinpoché, cherchait un moyen de réunir les fonds nécessaires aux réparations sans avoir à compter sur des dons extérieurs.
C’est alors qu’il se souvint des talents de nos moines dans l’artisanat. Depuis des générations, nous façonnions de petits objets décoratifs ou rituels pour notre usage personnel. Le maître eut l’idée lumineuse de mettre ces compétences à profit pour créer de véritables œuvres d’art que nous pourrions vendre aux visiteurs de passage.
Nous nous sommes donc mis à confectionner des bijoux raffinés en sculptant et taillant les pierres semi-précieuses que l’on trouve dans nos montagnes. Travailler ces gemmes selon la tradition était pour nous un moyen de prière et de méditation. Bien vite, la beauté et la qualité de nos pièces se firent connaître au-delà de notre vallée reculée. Les pèlerins et marchands affluèrent pour s’en procurer, générant les recettes nécessaires pour la réfection du temple. Depuis, cette activité est devenue un pilier essentiel permettant de subvenir aux besoins de notre communauté monastique tout en perpétuant un artisanat d’exception.

Q3 : Quelle est la signification spirituelle derrière la création de vos bijoux ?

Bou Houat : Pour nous, la création de bijoux n’est pas qu’un simple artisanat, c’est un acte empreint d’une profonde dimension spirituelle. Dès la première étape, celle de sélectionner les pierres brutes, nous entrons dans un état d’esprit méditatif. En contemplant ces gemmes à l’état naturel, nous cherchons à ressentir leur énergie, leur histoire millénaire forgée au cœur de la Terre.
Lorsque nous commençons à les tailler et polir, chaque geste est accompli avec une intention sacrée. Nos mains deviennent les instruments pour révéler la beauté intérieure de la pierre, à l’image du chemin d’Illumination qui nous mène à déceler l’essence divine en chaque être. Le travail minutieux exige patience, concentration et lâcher-prise, autant de vertus prônées par les enseignements bouddhistes.
Une fois les pierres prêtes, nous les assemblons en y incorporant des symboles et motifs ancestraux porteurs de sens. Chaque bijou devient alors une véritable relique, un concentré d’énergie positive chargée de nos vœux de paix intérieure, de sagesse et de compassion. Porter l’une de nos créations, c’est s’ouvrir à la possibilité d’être touché par ces vibrations spirituelles et d’entamer un voyage initiatique vers soi-même. C’est notre humble façon de partager les trésors de notre quête d’Éveil avec le reste du monde.

Q4 : Pouvez-vous nous décrire le processus de fabrication de vos bijoux ?

Bou Houat : C’est un travail minutieux qui requiert patience et dextérité. Nous commençons par sélectionner les pierres les plus belles sur les marchés locaux. Ensuite, nous les taillons et les polissons à la main selon des techniques ancestrales. Vient alors l’étape de l’assemblage où nous créons des pièces uniques en mariant pierres, métaux précieux et symboles sacrés.

Q4 : Pouvez-vous nous décrire le processus de fabrication de vos bijoux ?

Bou Houat : La création de bijoux selon nos traditions monastiques est un processus long et méticuleux, qui demande une grande maîtrise artisanale mais aussi une profonde concentration spirituelle. Tout commence par la sélection rigoureuse des pierres sur les marchés locaux. Nous recherchons les gemmes les plus pures, aux couleurs et reflets les plus beaux.
Ensuite vient l’étape délicate de la taille à la main, selon des techniques ancestrales transmises de génération en génération. À l’aide d’outils simples mais d’une extrême précision, nous dégageons patiemment les facettes de la pierre, révélant toute la profondeur de ses tonalités et reflets caractéristiques.
Vient alors le montage sur les métaux précieux qui fait l’objet de rituels de purification et de bénédiction selon nos rites ancestraux. Une dernière phase de polissage vient parfaire l’éclat de l’ensemble avant que chaque pièce soit considérée comme une œuvre d’art totale.

Q6 : Avez-vous des élèves ou apprentis qui perpétueront cet artisanat sacré ?

Bou Houat : Bien sûr, la transmission fait partie intégrante de notre philosophie. Plusieurs jeunes moines étudient auprès de nos maîtres bijoutiers les plus expérimentés. Ils apprennent avec dévouement chaque geste, chaque symbole afin d’un jour pouvoir eux-mêmes créer de merveilleuses pièces imprégnées de spiritualité.

Q7 : Quel est votre plus grand souhait pour l’avenir de cette tradition ?

Bou Houat : Mon vœu le plus cher est que nos bijoux puissent continuer à toucher les cœurs des gens de par le monde. Qu’ils soient des ambassadeurs de paix, de tolérance et d’ouverture d’esprit. Et que les générations futures perpétuent ce savoir-faire unique, gardien des valeurs de notre riche héritage tibétain.